Ligue 2
ASSE : Laurent Batlles en questions
Au terme d’une saison 2022-2023 pour le moins mitigée, et d’un objectif remonté complètement raté, Laurent Batlles, l’entraîneur des Verts, conserve une belle image au sein du Peuple Vert. Logique ? <br/>
A-t-il été aidé à son arrivée ?
NON. Six jours, seulement, après la terrible désillusion en match retour de barrage contre l'AJ Auxerre, la direction de l'ASSE annonce officiellement la signature de Laurent Batlles comme entraîneur des Verts. Un contrat de deux ans qui vient mettre fin à l'aventure Dupraz et la présence du club en Ligue 1. Ancien joueur stéphanois, ex-adjoint de Christophe Galtier et à la tête de l'équipe réserve, Batlles sort de quelques mois sans travail, après son expérience troyenne. Il détient auprès des supporters une belle cote et le Peuple Vert se réjouit de sa nomination. Le technicien, et il le sait, débarque pourtant dans un champ de ruines. Les deux actionnaires ont publié quelques jours auparavant un communiqué annonçant leur départ. Un leurre en réalité. La commission de discipline n'a pas encore statué sur les graves incidents survenus au coup de sifflet final face à Auxerre. Il en coûtera trois points de pénalité et quatre matches à huis clos pour l'ASSE. Un handicap évident au lancement d'une saison. Batlles, enfin, a certes la possibilité de choisir son staff avec les venues d'Emmanuel Da Costa en qualité de premier adjoint et de Romain Brottes comme analyste vidéo (ancien Troyen) mais il sait que son vestiaire va être confronté à de terribles secousses. Avec des joueurs pressés d'aller voir ailleurs et qui n'ont plus la tête à l'ASSE et surtout pas à la Ligue 2. Il faut donc réussir le mercato estival et c'est loin d'être simple.
A-t-il réussi son mercato estival ?
NON. La réponse paraît aujourd'hui évidente. Ce qui n'était pas nécessairement le cas au sortir de l'été, il faut bien le reconnaître. Il y avait alors de l'espoir sur le revenant Dylan Chambost ou sur l'expérimenté Jimmy Giraudon. Ca ne va pas durer. Anthony Briançon, lui, qui va parfaitement bien terminer la saison, rate tout ce qu'il entreprend à son arrivée dans le Forez. Trop d'engagement, de fautes inutiles et de suspensions évitables. Leo Pétrot, qui lui-aussi effectue son retour au club, ne rassure guère, que ce soit sur le côté ou en défense centrale. L'équipe est alors mal équilibrée, ouvre trop d'espaces au milieu de terrain, secteur dans lequel les supporters apprécient néanmoins les venues de Benjamin Bouchouari, performant à ses débuts, et de Thomas Monconduit. Il va falloir attendre la toute fin du mercato estival pour voir l'arrivée d'Ibrahima Wadji qui, en effet, soulagera devant Jean-Philippe Krasso, et se féliciter des débuts encourageants de Mathieu Cafaro, On ne sait, hormis les Troyens bien entendu, qui a porté la responsabilité des transferts de l'été. Et si Batlles avait véritablement donné son accord pour tout le monde. Seule certitude, il y eut la sensation d'avoir du quantitatif et non du qualitatif. Les résultats du club vont vite le confirmer.
A-t-il pataugé à ses débuts ?
OUI. Un rapide retour sur le parcours stéphanois du début de saison permet de mesurer l'ampleur du désastre. Dans le jeu, bien entendu, et dans les résultats. Car si on peut encore s'indigner des revers à domicile contre Le Havre, Rodez (championnat et Coupe) ou encore le Paris FC, et sans crier au scandale sur certaines décisions arbitrales, des rencontres ont particulièrement été mal gérées. Notamment au niveau des choix tactiques en début ou en cours de match. En cause, comme trop souvent, des trous d'air au milieu de terrain jamais compensés. Ce fut notamment le cas à Quevilly ou il a fallu attendre d'être mené 2-0 pour un réajustement. A Valenciennes ou les Verts n'ont pas été en mesure de conserver l'avantage car incapables de garder le ballon. Longtemps, trop longtemps, que ce soit en septembre, ou au mois d'octobre, l'ASSE n'a jamais fait preuve de régularité, comme ce fut le cas après un très bon match contre Bordeaux et une parodie de football à Guingamp. L'ASSE ne s'est jamais appuyée sur des idées claires et un schéma de jeu identifié. Ce sera d'ailleurs le cas en seconde partie de saison mais les points bêtement perdus ne se rattrapent pas, à tel point que l'ASSE était en fâcheuse posture lors de la trêve Coupe du monde. Une triste réalité que l'on ne peut imputer au seul Batlles, il est vrai. Mais il ne peut échapper aux critiques.
A-t-il été soutenu par ses dirigeants ?
NON. C'était à la mi novembre 2022, au sortir d'une défaite face à Rodez dans le chaudron et d'une dernière place au classement de Ligue 2. Jean-François Soucasse, directeur exécutif du club, était venu s'asseoir à côté de Laurent Batlles en conférence de presse, lâchant les propos suivants : "« C’est ma place d’être là et on ne peut pas laisser Laurent seul face aux difficultés que le club rencontre. Ce soir, on a touché le fond et les limites d’une équipe qui après avoir montré de belles choses, se trouve aujourd’hui dans la difficulté. Quand on voit le travail qui est effectué, le professionnalisme des gens qui essayent de porter ce club de la meilleure des façons, la moindre des choses est d’être à leur côtés. J’ai entendu les critiques, les chants. Par contre quand on aime son club, son métier, le sport, il y a deux manières. Soit on baisse la garde, et on va chercher 10000 responsabilités. Ça, c’est l’arme des faibles. On ne s’honore pas quand on cherche des coupables là où il n’y en a pas. " Si la citation mérite le détour, ce n'est pas pour son contenu, mais plutôt pour sa rareté. Car pendant que les deux actionnaires ne commentent pas leur rétropédalage sur la vente, ne daignent pas expliquer pourquoi ils sont toujours là et que Bernard Caïazzo ne met même plus un pied au stade…, le reste de la direction se tait. Alors que le club s'enfonce dans les tréfonds de la L2. Loïc Perrin ? Silence radio. Samuel Rumsten ? Idem. Soucasse ? Une prise de parole et puis c'est tout. Pour le reste, circulez il n'y a rien à voir. Batlles, qui savait à quel point ce club était spécial, a donc eu le temps de constater à quel point il n'était pas épaulé. Il le sera, finalement, à l'hiver, non pas sous forme de déclaration, mais de moyens financiers mis à disposition. Batlles le savait également : ce n'était guère pour sauver sa place. Trop inquiets de voir les Verts en National, et de la valeur de leur actions…, Caïazzo et Romeyer vont permettre un mercato hivernal digne de ce nom. Tout en ayant multiplié les contacts pour trouver un successeur à Batlles….
Est-il responsable du bon mercato hivernal ?
OUI ET NON. Il est une évidence qu'aucun joueur désormais à l'ASSE ne serait venu en cas de refus catégorique de Batlles. Mais pour vous donner un exemple précis, Gautier Larsonneur est arrivé au chevet de la maison verte en raison du coup de pouce de Roland Romeyer. Batlles, lui, avait longuement insisté pour Gauthier Gallon, le portier de l'ESTAC. On connaît la suite, avec l'apport déterminant de Larsonneur, homme clé de la seconde partie de saison. A mettre au crédit de Batlles, en revanche, et comment ne pas parler de sacrée trouvaille, la venue de Niels Nkounkou, que personne ne connaissait en France avant sa remarquable partie de saison avec les Verts. Nkounkou à gauche, Appiah à droite, c'est signé Batlles, même si, une fois encore, les finances vont permettre d'opérer un si bon mercato hivernal, avec, de surcroît, le transfert de Gaëtan Charbonnier qui aura le temps de confirmer son potentiel avant d'être victime d'une grave blessure ligamentaire. Indéniablement, Batlles a opéré de bons coups il y a quelques mois. Dommage, et la critique vaut pour toute la direction, d'avoir attendu le second mercato pour enfin être performant.
Est-il à la base du sauvetage de l'ASSE ?
OUI. Il n'y a pas que les résultats des Verts en seconde partie de saison qui ont été réjouissants. Le jeu proposé l'a été également. Avec une volonté offensive déclarée, des occasions nombreuses, des buts et, nécessairement, quelques manques au milieu de terrain qui, parfois, ont conduit à des fins de matches stressantes ou à des matches nuls regrettables. On a enfin vu une ASSE conquérante et on le doit à Batlles, quoi que certains puissent en penser. Il sera d'ailleurs intéressant de voir, en fonctions des joueurs qui porteront le maillot Vert la saison prochaine, si le technicien de l'ASSE arrive à proposer le même jeu. Nkunku ne sera sans doute plus là, Krasso, non plus, et il faudra travailler à nouveau certains automatismes. A voir si Batlles est susceptible d'y arriver. Seule certitude, et bien avant le gong de la saison 2023-2024, il disposera d'un effectif pour tenter de remonter en Ligue 1.